Une nouvelle ère s’ouvre-t-elle pour les batteries lithium-ion ? Peut-être grâce à des chercheurs qui viennent de présenter des piles rechargeables peintes sur à peu près n’importe quelle surface. Le potentiel de cette invention sera gigantesque… lorsque certaines contraintes auront disparu.

Sans les batteries lithium-ion, nos téléphones et ordinateurs portables seraient bien plus volumineux, tout en ayant une autonomie diminuée. Ces sources d’énergie rechargeables ont évolué de manière importante ces dernières années, en capacités et en tailles.

Cependant, un élément n’a pas changé : leur forme. L’utilisation de batteries cylindriques ou rectangulaires impose d’importantes contraintes aux designers. De nombreuses études sont donc menées pour s’affranchir de cette dernière limitation. Pourquoi, par exemple, ne pas essayer de les transformer en revêtements, à l’image de ce qui se fait pour certaines cellules photovoltaïques ? Cette solution permettrait ainsi de construire de nouveaux appareils électroniques dépourvus de compartiment à piles.

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Durant les tests, des batteries Lithium-ion ont été « peintes » sur du verre (a), de l’acier (b), de la céramique (c). Les tuiles de céramique ont parfois été recouvertes en plus d’un panneau photovoltaïque permettant de recharger le dispositif (d). Neuf tuiles ont également été assemblées pour alimenter 40 Led (e). Des diodes électroluminescentes ont brillé grâce à une alimentation électrique déposée sur du plastique (f) ou sur un mug en céramique (g). Dans ces deux derniers cas, la forme du support n’était pas plane, ni même lisse. © Singh et al. 2012, Scientific Reports 

Une batterie lithium-ion se compose, d’une manière simplifiée, d’une série de couches prises en sandwich. Les cathodes et les anodes sont séparées par un électrolyte, contenant notamment des ions, et par une membrane qui leur est perméable. Le tout est coincé entre deux collecteurs de courant généralement composés d’aluminium (côté cathode) et de cuivre (côté anode). Les piles cylindriques sont formées d’un enroulement de ces couches autour d’un axe vertical.

Une équipe de chercheurs menée par Nellam Singh, de la Rice University aux États-Unis, est parvenue à rendre liquides les constituants de ces cinq couches. Ils ont ensuite fabriqué des batteries sur différentes surfaces en pulvérisant ces composants successivement l’un sur l’autre à l’aide d’un pistolet à peinture ! Leur invention, brevetée, est présentée dans la revue Scientific Reports.

Des batteries en peinture pour des maisons autonomes ?

Les essais ont été réalisés sur des tuiles de céramique, des plaques de verre ou des feuilles d’acier inoxydable. La première couche, le collecteur de courant de la cathode, se compose notamment de « hypo SWCNT », un matériau créé par la Rice University qui contient des nanotubes de carbone. Le deuxième revêtement, la cathode, est quant à lui fait de dioxyde de cobalt et de lithium (LiCoO2). Il a été recouvert par un mélange de polymères projeté dans de l’acétone. L’anode a ensuite été « peinte » grâce à une pulvérisation de dioxyde de titane et de lithium (Li4Ti5O12). Finalement, le tout a été recouvert de cuivre, le collecteur de courant de l’anode également utilisé dans une batterie classique. Toutes ces opérations ont été menées sur des matériaux maintenus à une température de 90 à 120 °C. Après leur fabrication, les batteries ont été « séchées » dans un environnement saturé en argon puis activées grâce à un bain dans une solution d’électrolyte.

Neuf tuiles de céramique « rechargeables » ont ensuite été montées en parallèle. L’une d’entre elles a en plus été recouverte d’un panneau photovoltaïque capable de fournir le courant à emmagasiner (capacité de stockage d’environ 0,65 Wh, soit 6 Wh par m2 de surface enduite). Ce dispositif a été utilisé pour faire briller 40 diodes électroluminescentes, indiquant le mot « rice », pendant 6 heures (à 40 mA) grâce à une tension de 2,4 V.

Cette invention a un potentiel considérable. Des maisons seront peut-être un jour totalement recouvertes de batteries sans que cela ne choque d’un point de vue esthétique. Alimentées par des panneaux solaires, ces batteries permettront alors à nos habitations de devenir énergétiquement autonomes. Cependant, de très nombreuses étapes restent à franchir avant d’en arriver là. Car le procédé de fabrication souffre de nombreuses faiblesses : les électrolytes liquides sont toxiques, inflammables et potentiellement corrosifs. De plus, la fabrication des cellules nécessite un environnement dépourvu d’oxygène (remplacé par l’argon) et d’humidité. L’équipe de Nellam Singh travaille maintenant pour s’affranchir de tous ces problèmes.

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